Lusopholie

Lettres, poésie et musique lusophones

Archive pour le 7 février, 2007

recette

Posté : 7 février, 2007 @ 9:56 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

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(photo www.memoire-vive.org)

- Alors, si vous n’avez plus besoin de moi… dit Laurinda en revenant dans la – J’ai horreur de ça ! s’exclama Vanda, en colère, en éteignant le téléphone. Pourquoi André a-t-il un téléphone dans sa voiture s’il ne s’en sert pas ?
- Laissez, il a dû oublier de le rallumer.
- Oublier ? répéta Vanda, sceptique. Je sais que je ne devrais pas dire ça, mais quelque fois j’en arrive à penser… J’en arrive à penser qu’il voit quelqu’un d’autre.
- Il y a une façon de le découvrir, Madame Vanda. Moi, une fois, j’ai fait ça à mon mari, que Dieu le guarde bien tranquille. Il était bizarre, il ne disait plus rien, encore moins que d’habitude, il n’a jamais été homme à faire de grands discours…
- Qu’est-ce que vous avez fait ? interrompit Vanda, inquiète. Un truc de sorcellerie, non ? Je ne suis pas partisane de ces trucs-là, je ne sais pas, j’ai très peur…
- Pas question de sorcellerie, Madame Vanda. Faites ce que je vous dis : une nuit où vous sentez que Monsieur est en train de rêver, vous lui mettez une main sur le cœur; doucement pour ne pas le réveiller, comme ça, expliqua Laurinda en posant la main droite sur son cœur. Vous lui demandez ce que vous voulez et vous verrez comment il répond.
- Ah oui ? Comme c’est curieux. Et avec vous, ça a marché ?
- Marché, on ne peut pas vraiment dire, admit Laurinda. Mais ça n’a pas marché, Madame Vanda, parce que ce sacré salopard, Dieu me pardonne, avait le sommeil léger et se réveillait pour un oui pour un non. J’ai encore essayé quelques fois, mais à peine je posais la main sur lui, cet idiot se réveillait ou se mettait à remuer dans tous les sens jusqu’à se tourner de l’autre côté. Mais je connais quelqu’un qui l’a fait et je sais que ça a donné de bons résultats. Monsieur votre mari a le sommeil lourd ?
- Très lourd ! s’exclama Vanda en riant. Laissez, je vais essayer et après je vous raconterai… Oh, Laurinda, ç’a été un moment de faiblesse, d’accord ? Comprenez bien que je ne crois pas une minute qu’André m’ait jamais trompé, hein ?
- Oui, dit Laurinda en regardant le bout de ses chaussures. Avec la vérité tu me trompes, ça m’étonnerait pas qu’il aille faire un tour ailleurs de temps en temps. Ils sont plus nombreux à le faire qu’à pas le faire, voilà la vérité.

Ana Nobre de Gusmão, Aves do Paraíso, Asa, 1997

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