Danger
A cabocla, Carlo de Servi (1871-1927)
Irinéia arrivait par la route, on entendait au loin sa chanson ancienne, une ritournelle aussi gaie que les rubans dans ses cheveux, que le vermeil de ses joues et le rouge mal passé sur ses lèvres. Elle savait que chez le Vieux elle trouverait un abri, car les portes étaient toujours ouvertes. Quand elle en aurait l’occasion, elle lui dirait la nouvelle. Elle désirait se reposer des nuits dormies sous les arbres, exposée au froid et aux assauts de la peur. L’appentis offrait un sol propre et d’odorantes poutres de umburana, où appuyer son corps fatigué. Et en attendant le repos, un silence de rien, et puis tout dire. Elle pouvait chanter si elle voulait, être joyeuse ou triste. Le Vieux balançait la tête, riait doucement, parlait bas. C’était bon d’être là. Il y avait l’appentis devant, où le Vieux était assis, et, derrière, la maison à trois baies, grande comme l’âme d’un homme qui avait beaucoup vécu. Personne ne savait qui avait été le premier à exister, le Vieux ou la maison. On l’avait toujours vu là, ses cheveux perdant leur noirceur, comme le jour, la lumière.