Lusopholie

Lettres, poésie et musique lusophones

ni l’un ni l’autre

Classé dans : - époque contemporaine,littérature et culture — 30 avril, 2007 @ 10:41

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La serra de Monchique

C’est curieux que, malgré tout, nous soyons toujours « de Monchique » ! L’Algarve est devenue la plus internationale et la plus cosmopolite de nos provinces. On dit même que les gens de l’Algarve sont moins provinciaux que ceux de Lisbonne. Cette région est à la croisée des chemins de multiples langues. Mais nous, ici, nous avons toujours une côte alentejana et une algarvia, et pourtant, nous ne voulons pas plus être de l’Alentejo que nous nous sentons « du bord de l’eau ». Et nous avons une impression profonde de différence, on pourrait presque dire d’indépendance. Serait-ce à cause de l’altitude ? De la largeur de l’horizon, que l’on domine du regard, des plaines de l’Alentejo aux découpes de la côte ?

Nous somme toujours des « montagnards », avec tout ce que ça peut avoir de bon et de beau : nous sentons encore le ciste et la bruyère, le pin et le romarin. Nous avons encore dans les yeux le bleu des distances, et dans les gestes, le vert des forêts. Dans la voix, le bouillonnement des chutes d’eau et dans les pas, la consistance de la terre mouillée.
C’est peut-être pour ça que nous sommes toujours, obstinément, monchiqueiros. Et que c’est bon de demeurer, encore, égaux à nous-mêmes ! Pour combien de temps ?
Il y a quelque temps, je suis allé me promener sur la plage : j’aime la mer et le soleil, le va et vient des vagues et de la lumière qui se déverse sur le sable. Mais je ne supporte plus très bien la foule prête à nous étouffer. C’est pourquoi nous avons cherché une plage toute petite, du côté de Sagres. Fini le temps où nous passions le mois de juillet à Praia da Luz, juste en compagnie de deux ou trois familles (nous devenions amis) et des pêcheurs…
La plage où je suis allé, en plus d’être petite, a encore un peu l’air d’être de l’ «ancien temps ». Nous sommes rentrés le soir. Avant de monter dans la voiture, nous sommes passés par le café. Devant l’escalier j’ai croisé un touriste. Un homme de plus de 70 ans (très bien conservé) maigre, haut et droit, chapeau blanc sur la tête, chemise tout ouverte aux deux pointes tombantes sur un bermuda jaune, orné de grandes fleurs bleues, pourpres et lilas, qui le fleurissaient jusqu’aux genoux, sandales, chaussettes courtes, une serviette de bain enroulée sous le bras. Des yeux vaguement gris et une petite moustache blanche bien dessinée, assortie au chapeau. Il regardait les autres avec une certaine supériorité et damait le pion à n’importe quel Sir Edward de série télévisée. S’il m’avait fallu deviner sa nationalité, je me serais risqué à dire qu’il était anglais.
Au moment où je l’ai croisé, il s’est arrêté pour regarder autour de lui, comme s’il cherchait quelqu’un. C’est alors que je l’ai entendu articuler, en un épanchement portugais des plus purs :
- Ah, merde… Voilà que je sais plus où ils sont passés ! ! !

António de Silva Carriço, O sabor da vida, (Chroniques) juillet 1989

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