Expérience dans un cercle
- Ici, entre nous, dis-je, par désoeuvrement, à quelqu’un qui ne savait que faire, les récentes mesures prises sont correctes, mais du point de vue éthique, elles reviennent à désinfecter la guillotine avant l’exécution.
- La démocratie est une erreur, qui ne peut être corrigée que par une autre erreur. Mais il faudrait que ce soit une erreur parfaite.
- Il n’y a pas d’erreurs parfaites, c’est pour ça que nous sommes dans cette situation ! S’il y en avait, nous n’aurions pas besoin de corriger sans cesse quoi que ce soit, entendis-je dire à une voix mi-résignée, mi-enthousiaste.
- Juste une petite observation, je ne veux pas vous corriger, ajoutai-je, sans savoir où j’allais. N’est-ce pas étrange, aussi incroyable que nous pensions ce processus unique, dans notre pays, que ça n’ait aucune explication possible ?
- Ça n’a rien d’extraordinaire, – la même voix ou une autre interrompit mon raisonnement – dans un discours on peut remplacer le mot « démocratie » par une virgule et rien en change.
- La démocratie n’est rien comparée à ce qu’elle permet : unir le peuple sous la bannière de la stupidité.
- Non, c’est, et cela a toujours été, le meilleur du patriotisme qui ait jamais existé.
On ne comprenait plus qui parlait et si c’était une conversation ou un écho de la mémoire. Cependant, dans les conversations avec la foule peu importe ce qui se dit ni ce qu’on entend, ce qui est intéressant, c’est comment c’est interprété.
- J’ai même envoyé une lettre à Notre Dame du Bon Succès, à ce moment-là ministre de la santé, non, je mens, de l’éducation…
- Aux législatives, contre toute expectative, nous choisissons toujours les meilleurs menteurs ! C’est un fait.
- C’est vrai que la politique est une petite pièce de théâtre… Pas une farce, à proprement parler, attention ! Ce qui m’énerve, c’est que tout le monde critique la distribution des rôles, et que personne ne s’occupe de l’intrigue.
- Asseyez-vous! C’est un affront pour les bêtes !
Les animaux, pratiquement de toutes les espèces, des dizaines ou des centaines de milliers, si je ne les confondais pas avec la jungle (en vérité, ils le faisaient aussi eux-mêmes), étaient déjà autour du cercle, à une distance respectable, et regardaient avec une certaine méfiance, comme il est naturel lorsqu’on est étonné.
Dimíter Ánguelov, Longe da espécie, inédit.