Lusopholie

Lettres, poésie et musique lusophones

Archive pour mai, 2007

Souvenirs

Posté : 13 mai, 2007 @ 7:18 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

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Souvenirs dans - époque contemporaine cecile12

 

Sainte Cécile, Peinture sur bois du Maître du retable de Saint Bartholomée.(Alte Pinakothek de Munich)

J’éteins la radio, j’apprécie le silence de Coimbra, comme les autres fois, il y a deux mois ou il y a presque un an.
Il y a deux mois, en revenant de Saint-Jacques à Lisbonne, je me suis arrêté ici, il faisait nuit. Il y a un peu plus de dix mois, en allant de Lisbonne à Saint-Jacques, je me suis aussi arrêté, mais de jour. Je suis passé par ici, il y a dix mois, pour me rendre à l’adresse que j’avais notée sur un bout de papier, dans une rue proche de l’ancienne université. Mais je me rappelle bien avoir hésité quand, il y a dix mois, à mi-chemin de mon voyage à Saint-Jacques, je cherchais la rue dont j’avais noté le nom et le vieil homme qui y habitait. Je ne l’avais plus cherché depuis longtemps, depuis longtemps je ne pensais à lui que rarement, depuis que m on vieux professeur avait quitté Lisbonne. Quelques lettres brèves lettres échangées par obligation, un ou deux coups de téléphones de pure courtoisie, et rien d’autre. Il y a dix mois j’ai donc arrêté ma voiture devant sa porte, il faisait jour, il y avait des étudiants dans des rues proches et ma mémoire qui s’obstinait à insister. A présent je m’arrête de nouveau devant sa porte, et je regarde autour de moi en quête d’un café. A cette heure il n’y a rien d’ouvert.
- Et alors, qu’est-ce qui se passe ?
Cette voix aussi, je me la rappelle bien de mon enfance, dans la pièce d’étude de mon premier professeur. Mon premier cours.

 

 

 

 

 

 

 

 

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Méfiance

Posté : 10 mai, 2007 @ 8:30 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

Méfiance dans - époque contemporaine ana_vi10

Visage (Aquarelle de Ana Diogo)

- Toi, je vais te dessiner à au moins trois mètres de distance, dit-il en remettant ses lunettes noires.
Mariana le regarda, étonnée.
- Pourquoi ?
- Parce que c’est la distance de la prudence, répondit Lucas en esquissant un sourire.
- Ça veut dire quoi, demanda Flor.
- Que je suis protégé, parce que je suis hors de portée du pouvoir de séduction de Mariana, répondit-il.
- Et qui t’a dit que j’avais envie de te séduire, demanda Mariana.
- Ce n’est pas la peine, répondit Lucas en lui posant la main sur le bras. C’est une question d’empathie
ou d’âmes sœurs, si tu préfères.

Il retira sa main.
- Tu es gonflé, murmura Flor, méprisante. Tu es un
- Un collectionneur de caractères, compléta-t-il. Etudier le caractère de quelqu’un, ça me fascine, c’est passionnant.
Mariana réprima un frisson.
- Ça veut dire qu’en faisant le portrait de quelqu’un, tu étudies aussi son caractère. Ça peut être dangereux.
Lucas regarda Flor – Un portrait n’est bon que lorsque l’artiste réalise une symbiose parfaite entre l’aspect physique du modèle et sa personnalité. Et pour ça, il est fondamental de parler avec lui, de l’écouter, de le connaître, de tout savoir de sa vie, ce qui le passionne et ce qui lui fait de la peine, ce qui le fait vibrer et ce qui le déprime
ce qui le laisse indifférent et ce qui le rendrait capable de tuer
et de dessiner d’innombrables fois les différentes expressions de son visage, ses mimiques et ses rictus, sa façon de regarder, le langage de son corps
jusqu’à ce qu’on parvienne à capter une émotion dissimulée, quelque chose de feint, quelque chose de faux.
- Tu es dangereux, répéta Mariana avec un rire nerveux. Je vois qu’avec toi il faut que je fasse très attention à ce que je dis et à ce que je fais.

Ana Nobre de Gusmão, O Pintor, Asa, 2004

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Voyage à Madeira

Posté : 9 mai, 2007 @ 8:44 dans musique et chansons, vidéos documentaires | Pas de commentaires »

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Expérience dans un cercle

Posté : 8 mai, 2007 @ 6:20 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

nuitjungleverte.jpg

 

 

 

 

 

 

- Ici, entre nous, dis-je, par désoeuvrement, à quelqu’un qui ne savait que faire, les récentes mesures prises sont correctes, mais du point de vue éthique, elles reviennent à désinfecter la guillotine avant l’exécution.
- La démocratie est une erreur, qui ne peut être corrigée que par une autre erreur. Mais il faudrait que ce soit une erreur parfaite.
- Il n’y a pas d’erreurs parfaites, c’est pour ça que nous sommes dans cette situation ! S’il y en avait, nous n’aurions pas besoin de corriger sans cesse quoi que ce soit, entendis-je dire à une voix mi-résignée, mi-enthousiaste.
- Juste une petite observation, je ne veux pas vous corriger, ajoutai-je, sans savoir où j’allais. N’est-ce pas étrange, aussi incroyable que nous pensions ce processus unique, dans notre pays, que ça n’ait aucune explication possible ?
- Ça n’a rien d’extraordinaire, – la même voix ou une autre interrompit mon raisonnement – dans un discours on peut remplacer le mot « démocratie » par une virgule et rien en change.
- La démocratie n’est rien comparée à ce qu’elle permet : unir le peuple sous la bannière de la stupidité.
- Non, c’est, et cela a toujours été, le meilleur du patriotisme qui ait jamais existé.

On ne comprenait plus qui parlait et si c’était une conversation ou un écho de la mémoire. Cependant, dans les conversations avec la foule peu importe ce qui se dit ni ce qu’on entend, ce qui est intéressant, c’est comment c’est interprété.
- J’ai même envoyé une lettre à Notre Dame du Bon Succès, à ce moment-là ministre de la santé, non, je mens, de l’éducation…
- Aux législatives, contre toute expectative, nous choisissons toujours les meilleurs menteurs ! C’est un fait.
- C’est vrai que la politique est une petite pièce de théâtre… Pas une farce, à proprement parler, attention ! Ce qui m’énerve, c’est que tout le monde critique la distribution des rôles, et que personne ne s’occupe de l’intrigue.
- Asseyez-vous! C’est un affront pour les bêtes !
Les animaux, pratiquement de toutes les espèces, des dizaines ou des centaines de milliers, si je ne les confondais pas avec la jungle (en vérité, ils le faisaient aussi eux-mêmes), étaient déjà autour du cercle, à une distance respectable, et regardaient avec une certaine méfiance, comme il est naturel lorsqu’on est étonné.

Dimíter Ánguelov, Longe da espécie, inédit.

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kizomba

Posté : 8 mai, 2007 @ 11:02 dans musique et chansons, vidéos documentaires | 4 commentaires »

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Suzanna Lubrano (Cap Vert), Nha sonho

Chanteuse de kizomba (en créole portugais). Kora Award en 2003 (meilleur artiste de l’Afrique occidentale et meilleur artiste africaine). Née en 1975 dans l’île de Santiago, mais a émigré avec la famille vers la Hollande à l’âge de 4 ans.

C’est là qu’elle a entamé, à l’âge de 18 ans, sa carrière artistique dans le groupe « Rabelados ». Elle a ensuite enregistré trois albums solo, « Sem bo nes mundo », « Fofo », « Tudo Pa Bo » (voir ci-dessous) et « Musa do zouk ».

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Frayeur

Posté : 8 mai, 2007 @ 9:40 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

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Monstre. www.galienni.typepad.com

J’étais aux prises avec ces réflexions si complexes et si atroces (à causes d’elles, je n’avais pas vu Manuela depuis trois mois), lorsqu’elle me téléphona : « Je veux aller passer le week-end dans ta maison de campagne ! », décida-t-elle, en mon nom. Nous y allâmes. Je ne mentionnerai pas l’impatience avec laquelle je fis le voyage jusque là-bas. Je bandais comme un âne. Finalement, au bout de trois mois, tout me paraissait clair : je l’aimais. Simão (malgré tout le respect que je lui devais) et el compañero ne me préoccupaient plus ; je décidai, par conséquent, que j’allais épouser Manuela, et que, dès que nous serions arrivés, je lui en parlerais.
Je n’eus pas le temps de prononcer un mot, car à peine étions-nous entrés que Manuela se jeta sur moi ; avec une gloutonnerie que je n’avais pas oubliée une seule minute pendant les trois mois où nous ne nous étions pas vus, elle m’arracha (littéralement) mes vêtements et, me couchant sur le dos, s’assit avec plaisir sur moi, et commença à me massacrer. J’ai toujours considéré que cette position était diabolique et uniquement recommandable pour les finitions, mais, ce jour-là, j’étais prêt à la laisser mener les choses à son gré, et même à proscrire la langue portugaise de notre processus, disons, érotico-communicatif.

 

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Je ne suis pas le seul

Posté : 7 mai, 2007 @ 8:14 dans musique et chansons, Poesie | Pas de commentaires »

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Xutos e pontapés- Não sou o unico

 

Tu penses que je suis un cas isolé,
je ne suis pas le seul à regarder le ciel
à voir s’envoler les rêves, en attendant qu’il se passe quelque chose
à passer ma rage, à éprouver des émotions,
à désirer ce que je n’ai pas, accro aux tentations.

Et quand les nuages disparaîtront
il restera le ciel bleu,
et quand les ténèbres s’ouvriront
tu verras, le soleil brillera.

Non, non, je ne suis pas le seul, je ne suis pas le seul à regarder le ciel.

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Machine

Posté : 7 mai, 2007 @ 7:30 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

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Les machines de guerre arrivent, mais n’ayez pas peur. Le problème, ce n’est pas les machines qui s’approchent d’ici, c’est les machines qui sont déjà là.
Les différentes générations mécaniques, votre Histoire, Walser : progressent. Tout comme nos idées. Mais les machines commencent à avoir une autonomie, les idées, non.
Les machines interfèrent déjà avec l’Histoire du pays et aussi avec notre biographie individuelle. Elles n’ont pas qu’un parcours matériel et événementiel. Elles ont aussi une Histoire de l’esprit, un chemin déjà accompli dans le monde de l’invisible, dans le monde de ce qu’on sent et qu’on pense. On pense même que les machines ont mené l’homme vers les endroits les plus proches de la Vérité.
Et ce qui peut être également réduit à un système binaire, c’est le bonheur. A un oui ou à un non, à 0 ou à 1 : il est ou il n’est pas. Et cette efficacité, mon cher, cette efficacité fondamentale, cette efficacité première, dépend aussi, en grande partie, des machines, de la vitesse à laquelle elles transforment les causes et les nécessités en effets bénéfiques. La félicité a déjà été réduite à un système que les machines comprennent, et dans lequel elles peuvent participer et intervenir. Aucun bonheur individuel n’est plus indépendant de la technologie, mon ami Walser. Si vous voulez des chiffres, nous pouvons jouer aux chiffres : le bonheur individuel d’un jour dépend, allez, à 70% de l’efficacité matérielle des machines. Que le bonheur invisible soit soumis à un bonheur concret, à un bonheur de matériaux en dialogue, de pièces métalliques qui s’emboîtent les unes dans les autres et résolvent les problèmes en accomplissant des tâches déterminées, cela peut paraître étrange : mais c’est notre siècle.
Être heureux ne dépend plus de choses que nous associons vulgairement au mot Esprit. Il dépend de matériaux concrets. Le bonheur humain est un mécanisme.

Gonçalo M. Tavares, A Máquina de Joseph Walser, Caminho, 2004

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