paradoxes
Gitans à la fontaine (Tissu appliqué d’Evelyne Régnault)
L’histoire de la lutte des classes, cependant, a été à ce propos plus troublante qu’éclairante pour moi. Mon arrière-grand-oncle aurait été un gros propriétaire, exploiteur d’une main d’œuvre pratiquement réduite en esclavage. J’ai connu plus tard les descendants de ces travailleurs, dans la maison de mon grand-père, où ils ne dépassaient pas le seuil pour décharger leurs ânes, sur lesquels arrivaient les légumes et les fruits des terres qu’ils travaillaient, et dont ils tiraient à peine plus du nécessaire à leur quotidien. Les comptes étaient toujours faits de façon à soustraire à leurs poches déjà vides ; et si cela, pour moi, était une contingence de l’époque que rien ne paraissait susceptible de changer, la lecture des Principes élémentaires de Philosophie de Politzer et de La Guerre civile d’Espagne de Hugh Thomas éveillait tout de même mon esprit à une réalité que, dans ma formation bourgeoise, j’équilibrais par les réactionnaires Berdiaef et Sartre, et le Concept de l’Angoisse de Kierkegaard, où le rêve collectif s’anéantissait contre le mur de la méditation individuelle.