Indécision
Il soufflait un vent de fin d’après-midi, plein de poussière et de feuilles sèches. Le Vieux s’était tu et regardait devant lui. Depuis le passage de Chagas Valadão, il était devenu plus calme, comme si une vague avait charrié vers lui les décombres d’un temps effacé de sa mémoire. De lourds coffres s’ouvraient sur des possessions oubliées. C’était un instant perdu que Chagas avait apporté, avec l’histoire de son crime, sa supplique d’absolution. Et le Vieux lui avait ouvert toutes les portes et l’avait traité avec compassion.
- Il a commis un vilain meurtre, aidé par deux autres. Ils ont demandé le gîte dans une ferme et, dans le silence de la nuit, ils ont assassiné les propriétaires et un petit garçon. Ils avaient l’intention de voler, mais ils n’ont rien trouvé. Ils ont versé le sang en vain, dit Irinéia, en remuant dans son coin.
- Je n’ai pas vu ça dans ses yeux. J’ai vu l’envie de s’en tirer, de soigner ses blessures et de calmer sa faim et sa soif. Ce n’est qu’après qu’il m’a tout raconté, et que j’ai eu connaissance du crime.
La lune était décroissante. Irinéia pouvait reposer son corps des épines des maquis, relever la tête dans la direction de la pensée logique. Elle avait parcouru tant de routes, les asiles comme celui du Vieux étaient rares. Ici, tout le monde s’arrêtait. La réputation de la maison allait loin, et c’est ça, peut-être, qui avait attiré Chagas Valadão dans sa fuite. Qui irait donner asile à un assassin qui avait la police volante aux trousses ? Il n’y avait que le Vieux, ou un autre qui serait intéressé par de l’argent. Le crime de Chagas avait brisé le cœur hospitalier des sertanejos. Et il était encore plus criminel parce qu’il était fils du pays et s’était servi de sa connaissance des gens pour atteindre son but.
Ronaldo Correia de Brito (Brésil), « En attendant la Volante », in Faca, Cosac & Naify, 2003
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