Lusopholie

Lettres, poésie et musique lusophones

Matin

Classé dans : - époque contemporaine,littérature et culture — 30 avril, 2008 @ 7:27

 

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Ecoutez, Laurinda, j’aurais besoin que vous m’amidonniez mon chemisier en soie, le rouge, vous voyez lequel c’est ? Je n’ai pas encore décidé si je vais le mettre ou pas, à cette heure-ci il est impossible de savoir ce que je vais avoir envie de porter plus tard, vous comprenez ?

- Pas de problème. J’ai presque fini la cuisine et je n’ai plus qu’un tour à faire au salon. Votre chambre, peut-être que c’est mieux…

- Vous pouvez laisser ma chambre pour mercredi. Faites-moi seulement la petite salle de bains et passez l’aspirateur au salon. Vous savez, comme d’habitude. Maintenant je vais essayer de commencer à me préparer, je suis énormément en retard. Je viens chercher le café après.

- Que Dieu vous garde, murmura Laurinda. Que Dieu vous garde, je m’occupe du message.

- Et mettez deux tasses sur le plateau, s’il vous plaît.

Je voudrais bien voir ce que ça va donner. La place de son mari n’était pas encore refroidie dans le lit qu’il y en avait déjà un. [...] Ça, c’était la première fois. Et puis il y a eu….

- Laurinda ! appela Celeste. Alors, ce café ?

- Voilà ! cria Laurinda en sortant les tasses du placard. Aujourd’hui, alors, tu es drôlement pressée, murmura-t-elle en écarquillant ses yeux globuleux.

- Je suis très en retard, gémit Céleste en faisant irruption dans la cuisine Elle était hors d’haleine, encore plus décoiffée et sa robe de chambre était à demi-ouverte, laissant voir les deux pointes de ses seins tombants. J’ai déjà dit à Marco de se lever, mais il n’y a pas moyen de tirer ce paresseux du lit.

- Vous n’avez qu’à le laisser dormir, madame.

- Et le laisser ici tout seul ? Pas question ! C’est à peine si je… je ne le connais pas très bien, Laurinda. Et il est… Je ne sais pas si vous voyez ? Il est un peu jeune.

- Un peu ? railla Laurinda. Avec le respect que je vous dois, ce gamin pourrait être votre fils.

Céleste rit, mal à l’aise. – Il n’est pas si jeune que ça. Il fait moins que son âge. Il va avoir trente ans le mois prochain.

- Trente ? répéta Laurinda, en jetant à Céleste un regard incrédule. C’est ce qu’il vous a dit ? Trente ? Pour moi, s’il en a vingt, c’est déjà beau.

- Vous exagérez, Laurinda ! s’exclama Céleste. Vous croyez ? demanda-t-elle avec un soupçon d’inquiétude dans la voix.

- Bien sûr, puisque je l’ai vu à la même distance que je vous vois et qu’il était tout nu devant moi ! Pas un poil sur la poitrine. Les hommes faits ont des poils. Pas forcément beaucoup, il y en a même qui en ont très peu, mais ils en ont toujours quelques-uns. Et son visage… Non, excusez-moi, que Dieu vous donne la sainte patience, Madame Céleste, mais je ne le crois pas.

Ana Nobre de Gusmão, Aves do Paraíso, Asa, 1997

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