Lusopholie

Lettres, poésie et musique lusophones

Archive pour septembre, 2008

Ne me quitte pas

Posté : 17 septembre, 2008 @ 8:40 dans littérature et culture, musique et chansons, Poesie | 7 commentaires »

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Pedro Abrunhosa, Será

Me reste-t-il encore du temps avec toi
ou est-ce qu’un ennemi te sépare de moi ?
Ai-je su te donner tout ce que tu voulais
ou me suis-je laissé mourir dans la lente mort des jours ?
Ai-je fais tout ce que je pouvais faire
ou ai-je été lâche, pour ne pas voir souffrir ?

Le ciel à l’horizon est-il encore bleu
ou le gris y mélange-t-il le Nord et le Sud ?
Ta peau est-elle toujours aussi douce
ou ma main tremble-t-elle, sa ardeur ni magie ?
Est-ce que je vaux encore quelque chose pour toi
ou la nuit découvre-t-elle la douleur qui cache le plaisir ?

Ce feu est-il dû à la fièvre,
ce cri cruel qui fait un loup du lièvre
Demain existe-t-il pour toi
ou est-ce qu’en t’embrassant je t’ai fait mourir ?
Dehors, les voitures passent-elles encore
ou des étoiles sont-elles tombées, amenant le mauvais sort ?

La ville est-elle la même qu’avant
ou des fantômes chantent et dansent des géants ?
Le soleil se couche-t-il du côté de la mer
ou cette lumière sur moi est l’ombre du clair de lune ?
Est-ce que les maisons chantent, et les pierres du sol
ou la montagne s’est tue, le volcan s’est rendu ?

Est-ce que tu sais qu’aujourd’hui c’est dimanche ?
ou les jours sont immobiles comme des anges déchus ?
Est-ce que tu m’entends
ou est-il temps que tu supplies en essayant de sourire ?
Est-ce que tu sais que je te porte dans ma voix,
que ton monde est mon monde et qu’il est fait pour nous ?

Est-ce que tu te rappelles la couleur de nos regards
quand pour nous la nuit ne veut pas finir ?
Est-ce que tu sens encore cette main qui te serre
qui te tient avec la force de la mer contre la barre ?
Est-ce que tu peux m’entendre dire que je t’aime autant qu’un autre jour ?

Je sais que tu seras toujours à moi
Pas de nuit sans jour, pas de jour sans fin
Je sais que tu me veux, que tu m’aimes aussi
Que tu me désires en ce moment comme personne,
Ne t’en va pas, alors, ne me laisse pas seul
Je vais baiser ton sol et pleurer le chemin.

Ecouter la chanson en français : Dis moi -Pedro Abrunhosa

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Un vers

Posté : 13 septembre, 2008 @ 9:59 dans littérature et culture, Poesie | 2 commentaires »

 

28avrilbesteirofleursl017.jpg

Un vers. Rien de plus qu’un vers
scintillant
contre l’équilibre cosmique et
l’expansion de l’univers
dans la queue de la comète la plus errante
au cœur de l’espace et de son revers
une syllabe chantante
un vers

Manuel Alegre, Senhora das Tempestades, Dom Quixote, 1998

Engrenages

Posté : 11 septembre, 2008 @ 8:53 dans - époque contemporaine, littérature et culture | 2 commentaires »

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Le papier où était dessiné le mécanisme de l’horloge s‘étalait sur la table de diego álvares. On voyait les barres, la roue dentée et la palette, ainsi que les axes et les poids; et sur ces dessins étaient posés les yeux du juge et ceux du ferronnier. Ces yeux auraient été incommodés par la forte chaleur de la forge, s’ils n’y avaient pas été accoutumés (comme c’était le cas du forgeron), ou si l’intérêt n’avait pas été supérieur à la gêne (comme pour le juge).
- C’est très difficile, juge. Il va falloir que je sois rigoureux et précis et que ma main soit ferme, comme si j’étais chirurgien ; et en même temps que je batte le fer avec la force que l’on exige d’un forgeron.
- Ne vous inquiétez pas, je ne suis pas venu vous demander des comptes, diego álvares. Depuis le mois de mars je ne sais rien de ce qui ce qui se fait et je suis ici davantage pour être informé que pour contrôler votre travail.
Désignant alors les pièces terminées et celles qui étaient en cours de fabrication, le forgeron lui dit :
- Je garderai pour la fin les pièces les plus délicates, car alors je serai plus expérimenté. Celles-ci sont prêtes.
Il montrait du doigt ce à quoi sa voix faisait référence.
- Voici la roue dentée. Jugez de sa dimension et du fer qu’il a fallu pour la fabriquer. Ici vous avez les poids nécessaires à la régulation de votre horloge. Une ou deux pièces d’ajustage… comment va votre tour ?
Mais les yeux du juge ne se détachaient pas du coin de la forge où se trouvait la roue dentée ; elle lui arriverait au flanc s’il s’en approchait. C’était la fin de la première partie de son rêve qui sonnerait lorsque les pièces seraient emboîtées ; lorsque les poids seraient suspendus à leurs cordes enroulées sur un tambour ; lorsque, ces poids baissant, ils fourniraient au mécanisme la force suffisante pour actionner l’engrenage ; lorsque, pour maintenir le mouvement constant, on verrait fonctionner un ensemble formé de la roue dentée, de ses palettes et de sa barre de balancier ; lorsque cette roue dentée serait dans l’axe horizontal sur lequel elle s’appuyait et que les palettes seraient solidaires, pour leur part, d’un axe vertical ; lorsque serait visible, clairement visible, le mouvement de la roue, tournant des deux côtés, associée comme elle l’était à l’axe des palettes ; lorsque ce mouvement serait contrôlé par un axe approprié des palettes ; lorsqu’il pourrait contrôler lui-même le mouvement par une barre horizontale fixée à l’axe des palettes et les deux poids attachés aux extrémités de la barre. Il écarterait les poids pour retarder l’horloge et les rapprocherait pour l’avancer. Et son œuvre resterait après lui lorsque arriverait la fin de ses jours, et la postérité dirait de lui…
« Luís de Castro fut un bon juge. »

Sérgio Luís de Carvalho, As horas de Monsaraz, Campo das letras, 1997

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Une farce

Posté : 10 septembre, 2008 @ 9:35 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

carnaval.jpg

Carnaval à Lisbonne

La conversation semblait trop cordiale, au vu d’une voiture dans cet état.
- Il m’a attrapé du côté droit, en me doublant, et il m’a arraché le phare. Et il ne s’est même pas arrêté. Il m’a fallu une course folle de deux kilomètres pour le dépasser, et j’ai freiné brusquement. Il est rentré en plein dans le coffre, mais il est arrivé à se dégager et il s’est de nouveau échappé avec deux sacs, un de pomme de terres et l’autre d’oignons, coincés entre le capot et le reste.

- Et vous n’avez plus la porte du coffre ?

- C’est le vent qui l’a emporté, le courant d’air.

- Et les portières arrières ?

- Celle de gauche, je l’ai laissé à la peinture, et l’autre a été arrachée de ses gonds quand une moto s’est mise en travers de ma route. Heureusement, ça a été rapide.

- Où est l’avantage de la rapidité ? Je ne saisis pas.

- Elle est entrée par le côté gauche et elle est sortie avec la portière par le côté droit. Il y avait juste une petite égratignure sur le casque. Le gars est même venu me serrer la main et m’a remercié de ne pas avoir fermé la portière de gauche.

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