Afonso Henriques : dom Soleima
(www.aac.uc.pt)
On dit au Pape que le Roi Afonso du Portugal retenait sa mère prisonnière, et qu’il ne voulait pas la libérer ; et il lui envoya dire par l’évêque de Coimbra de libérer sa mère, et que s’il ne voulait pas le faire il l’excommunierait. Et le Roi dit qu’il ne la libérerait pour aucun homme, encore moins pour le Pape. Et l’évêque excommunia sa terre et s’enfuit de nuit. Et tôt le lendemain on dit au roi comment l’évêque avait excommunié le pays et s’était enfui. Le Roi s’en fut aussitôt à la cathédrale et appela tous les chanoines dans le cloître et leur dit de nommer parmi eux un évêque. Et ils lui dirent qu’ils ne le feraient pas car ils avaient un évêque. Le Roi leur dit que celui dont ils parlaient ne serait plus jamais évêque de tous les jours de sa vie. Et voyant qu’ils ne voulaient pas faire ce qu’il leur commandait, il les fit tous bannir de sa terre. Comme le Roi sortait du cloître, il vit venir un clerc qui était très noir de peau et lui demanda son nom ; et le clerc lui répondit qu’il avait nom Martinho. Le Roi, parce qu’il le voyait aussi noir, lui demanda le nom de son père, et il lui répondit qu’il s’appelait Soleima. Alors le Roi lui demanda s’il était un bon clerc et s’il connaissait bien l’office de l’église. Et Martinho lui dit :
« Sire, il n’y a en pas en Espagne deux qui le connussent mieux que moi. »
Et le Roi lui dit alors : « Tu seras l’évêque dom Soleima, et prépare-toi sur l’heure à me dire une messe. »
Le clerc lui répondit : « Je ne suis pas encore ordonné évêque pour pouvoir vous la dire. »
Et le Roi lui dit alors : « Je t’ordonne de me dire la messe sinon je te couperai la tête avec cette épée. »
Et le clerc pris de peur revêtit les parements et célébra l’office. Et cette histoire se sut à Rome et on pensa que le Roi était hérétique. Et le Pape lui envoya un cardinal qui lui montrât la foi.
(Crónicas Breves de Santa Cruz de Coimbra.)
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