Rêve

Jean-Antoine Houdon
La Frileuse
1783
Musée Fabre, Montpellier
C’est un être presque éthéré. Je ne peux dire si elle a existé ou si je l’ai inventée ; je sais qu’elle a disparu dans un souffle de plus en plus éphémère, avec deux yeux verts d’effroi. Je sais que je me suis mis à rêver, et que j’ai été emporté, perdu, comme une chose inerte…
Elle est morte transie de froid. Une femme pâle – comme un oiseau. De la tendresse et deux yeux verts d’effroi. Elle hésite, pose à peine les pieds par terre, pleure doucement, et elle va peut-être le réveiller, se plaindre… Elle n’ose pas, et ébauche un sourire aussitôt mouillé de larmes. Elle meurt de froid. En août – elle meurt de froid. Même pour lui sourire elle se cache, et elle se met alors à regarder le mur (je vais te dire où), à parler au mur, à se plaindre à la grande tache d’humidité de la paroi. Deux yeux verts d’effroi, une robe de soie, et des bas usés aux talons. Un rien de tendresse l’aurait sauvée – personne ne peut l’arracher à ce rêve informe.
Raul Brandão, Húmus, première édition 1907


la vague
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c'est comme ces adieux lancés sur la route bitumée d'étoiles, vers laquelle on s'avance mélancoliquement humble avec dans les pensées cette paisible nonchalance qui illumine parfois nos visages, ' le cur du temps' vient caresser tes sens que c'en
est magistral, puis soudain il y a dans l'air atone des passages aphones que j'emprunte en apnée les doigts crispés sur le fil d'ariane tressé d'anémones, là dans les profondeurs abyssales des chants cétacés ma vague déferlante vient fracasser ton corps d'épousée.
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