Une mission
Coucher de soleil à Tete (http://mocambique1.blogs.sapo.pt)
Il y a trois siècles, des prêtres barbus et catholiques avaient osé défier les anciens esprits M’bona, leur rachetant leur troupeau humain. Infatigables, remontant le Zambèze contre le courant, contournant ses traîtres bancs de sable, passant devant la cité de Tete, effectuant divers transbordements pour vaincre d’infranchissables barrières et changeant pour des tirants d’eau plus modestes que la nouvelle navigation puisse accepter, renonçant presque devant Zumbo mais poursuivant toujours, tournant à droite et remontant l’Aruângua, ils arrivaient enfin à ce bout inconnu du monde avec leur attirail et de nouveaux éléments de foi qui avaient même surpris Dedza, le grand dieu. Des béliers hydrauliques inouïs, qui allaient contre la nature en faisant monter l’eau alors qu’il est sûr et certain que la nature la fait descendre ; de nouvelles plantes, bonnes à manger mais assoiffées, qui ne poussent pas sans cette eau qui monte contre la nature.
Dans leurs épaisses soutanes brunes les prêtres étaient forts comme des taureaux et ils étaient en permanence rouges de chaleur et irascibles. Ils se déplaçaient rapidement et parlaient beaucoup à ce peuple sec et minuscule, donnaient des ordres sévères, comme si le temps ne suffisait pas pour exécuter un ordre donné (le peuple était intrigué par cet effort vain pour faire se hâter le temps, alors que même les enfants savent que c’est le temps qui contient les hommes et non le contraire).