Rébellion
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Le lendemain matin l’infirmière est venue me casser les oreilles avec de sibyllines admonestations, disant que j’avais offensé sa petite maman chérie en pensées et en paroles déversées en majuscules, sur la feuille A4, de ma propre main. Là où elle repose tranquillement, cette dame saura mieux que personne que ma motivation n’a pas été la basse vengeance d’un prisonnier amer dans ce qui ressemble à un attentat à l’intelligence de la mère dans les trompes de la fille, avec toute la charge de transmission héréditaire de la matière grise, ou du manque de matière grise, qu’implique l’allusion. Quand on me connaît, on sait que je me tamponne d’être séquestré, d’être un cobaye de la Science – pour le bien de l’humanité, j’espère – ou un professeur du secondaire qui fait ses cours au coup par coup. Je vais où le vent me pousse. La seule chose qui m’énerve, c’est lorsqu’on met en cause ma condition d’écrivain, et que, sans m’avoir lu, on me remet une attestation de médiocrité lors d’attaques qui me laissent abasourdi, sans me laisser le temps de riposter où ça fait vraiment mal aux agresseurs. J’ai été stupéfait lorsque l’infirmière s’est approchée de moi, hurlante, brandissant des copies de ce que j’avais écrit la veille, bien que je sois toujours en possession des originaux, pliés en quatre et mis dans la poche de ma blouse, rangés plus tard sous le traversin, dans l’illusion de garantir au moins un coin discret d’intimité à ma prose policée.