Cimetière imaginaire
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Alors que j’errais dans le cimetière central de la capitale d’un pays imaginaire, je fus surpris par une pierre tombale qui disait :
« Ci-gisent deux squelettes qui ne sont jamais parvenus à se rencontrer mais qui auraient pu être très heureux. »
Plus loin, je lus une autre épitaphe sur une dalle elle aussi sans date:
Et à côté :
« Ici dort une vérité qui, réveillée, serait un énorme mensonge. » Finalement, il s’agissait d’un cimetière de grandes vérités immortelles. Une tristesse hors du commun m’envahit et je me mis à me répéter à moi-même : « Ne sois pas triste, ne sois pas triste… » Mais à partir d’un certain moment je sentis que cette voix ne m’appartenait plus. Et une tristesse encore plus profonde, encore plus obscure et plus dense, s’empara de moi. Pour quelqu’un que je ne connaissais pas et qui criait sa douleur de si près. Me sentant sans défense, je me mis en colère et je criai à la cantonade, férocement : « Assez ! » et je ressentis un soulagement bienheureux, une béatitude.
J’étais devant une énorme dalle de marbre blanc avec un moustique de deux mètres de haut et deux lettres dessous : C.S.
Je ne me pus m’empêcher de rire.
- Un homme étrange, dit une voix condescendante, il a acheté une concession au cimetière pour enterrer le moustique qu’il a tué le jour même de son enterrement. Et, bien sûr, il lui a donné un nom d’homme. Le cimetière était le plus beau des jardins.
« Le plus beau des jardins ? », pensai-je.
- Mais qui dit cette énormité ?