Lusopholie

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Archive pour avril, 2010

La somnambule

Posté : 3 avril, 2010 @ 7:39 dans - époque contemporaine, littérature et culture | 2 commentaires »

la somnanbule de Gustave Courbet

Gustave Courbet, La somnambule

Après une brève hésitation, Laurinda ouvrit la porte du salon et sentit aussitôt un frisson lui parcourir le corps. Du calme ! ordonna-t-elle dans un murmure, en secouant les mains comme si elle était en train de pousser quelque chose ou quelqu’un devant elle. Rassure-toi, je prie Dieu pour toi, dit-elle très vite, en faisant trois fois son signe de croix. C’est toujours la même chose, pensa-t-elle, traversant le salon presque en courant pour remonter les persiennes des deux fenêtres. Dès que j’entre ici, je les sens. Cette pièce en est remplie. Et c’est la faute de cette maudite ici, accusa-t-elle en regardant par en-dessous La Somnambule de Courbet, accrochée au mur. Je ne veux même pas te voir, murmura-t-elle sur un ton menaçant. Mais comme elle finissait toujours par le faire, elle plongea son regard dans le regard fixe, pénétrant et inquiétant de la femme du tableau et elle resta immobile au milieu de la pièce, sans parvenir à détourner les yeux, comme hypnotisée, jusqu’à ce qu’un autre frisson la fasse revenir à la réalité.
– Sois maudite, jura-t-elle.
Je ne comprends pas comment la patronne consent à ça. Pour moi, ce fantôme attire le Mal. Je lui ai même dit une fois que, si ça se trouvait, c’était même possible que ce soit une envoyée du… de celui dont on ne doit pas prononcer le nom. Elle a ri et elle a dit que non, que c’était une copie d’un tableau ancien qui avait une grande valeur. Parce que ça peut être ancien et de valeur, l’un n’empêche pas l’autre. Mais moi, je sais ce que je sens. J’en ai même parlé à Madame Piedade, j’y suis allée exprès et tout, et elle m’a dit que je ne m’avise pas de la toucher avant qu’elle découvre qui c’était et ce qu’elle veut. « Ne la touchez pas, même avec un chiffon, elle m’a prévenue. « Attention, elle pourrait vous apporter beaucoup d’ennuis si elle est du côté du Mal, si par hasard vous la touchez. » Madame Piedade veut que je lui porte une photographie pour la lui montrer, mais comment je peux faire ? Et en attendant je ne la touche pas, bien sûr, même pas avec le bout du chiffon, la patronne n’a qu’à le faire si elle veut, moi je ne la touche pas. Madame Piedade dit que les gens comme moi doivent faire très attention. Elle dit que Madame Úrsula ne s’aperçoit de rien, qu’elle n’a pas la catégorie pour sentir quoi que ce soit, et donc que l’Autre ne peut pas l’atteindre. Mais moi, si, parce que tout ce qui est adossé me tombe dessus. Elle m’a bien dit de faire très attention. Je n’ai pas de chance, il fallait que ça me tombe dessus, ce pouvoir qui ne me sert à rien, juste à me compliquer la vie.

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Un dur

Posté : 2 avril, 2010 @ 9:30 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

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- On m’a dit tant de bien de vous, on m’a dit que vous étiez un détective si efficace, que j’ai décidé de m’adresser à vous pour vous faire une proposition.
Je ne résiste pas à un compliment. Et l’ambiance lourde du bureau peut transformer d’aimables paroles de circonstance en un moment de pure magie. Je m’attendris, sans perdre le Nord. Je suis un gros dur en dehors, un enfant en quête d’affection en dedans. En apparence, je ne me laisse jamais abattre. Mon devoir n’admet pas l’extériorisation des petites faiblesses humaines. Il est indispensable de faire bonne impression sur le client, ce qui passe par le respect de l’image de marque que je prétends imposer de moi-même. Personne ne remarque mes hésitations, l’éclat de mes yeux un peu terni, le tremblement de mes lèvres. Je me reprends vite, lorsque je suis ému. Personne ne s’aperçoit de rien.
- Je confirme. Je suis bon dans ma partie. Mais je me fais payer en conséquence.
- L’argent n’a pas d’importance. J’ai quelques économies. Elles devraient suffire.
- Parfait. C’est un excellent point de départ. Votre mari écrit quoi, concrètement ? Des romans, des pièces de théâtre, des livres sur la comptabilité, l’informatique, la psychologie ? Quoi ?
- Il est romancier, en effet.
- Des romans d’amour, de guerre, des policiers…
- Des romans d’amour.
- L’érotisme, le couteau et la bassine, la corde…
- De véritables romans d’amour.

J’ai tout de suite été curieux de lire quelque chose de cet Aureliano Viegas. Contrairement à l’idée qu’on peut se faire d’un détective, je lis de préférence des romans d’amour et non des policiers, par exemple. Quatre-vingt-dix pour cent des cas traités par mon agence sont des joutes amoureuses. Et si ces romans d’amour étaient véritables… l’écrivain en question venait de se faire un lecteur potentiel.
- Hum ! J’espère que vous n’êtes pas une épouse trahie de plus, désireuse de savoir avec quelle nana votre mari s’envoie en l’air. Parce que si c’est le cas, nous en resterons là. Pour le moment, ça ne m’intéresse pas. Je viens de résoudre un problème de ce genre et j’en ai un semblable entre les mains. Pour un professionnel de mon envergure, c’est fatiguant et peu créatif d’être toujours aux prises avec des enquêtes clonées les unes sur les autres.

- Rassurez-vous. Ce n’est pas un problème de cet ordre. Je préfèrerais ça.
- Pourquoi ? Vous n’êtes pas jalouse ?

- Absolument pas.

- C’est rare. Il vit de ce qu’il écrit, votre mari ?

- Il est professeur de portugais dans l’enseignement secondaire. Il écrit pendant ses heures de loisir. Essayiste le dimanche, romancier le samedi. Mais il n’y a que dans le roman qu’il se sent auteur.

- C’est bien ce qu’il me semblait. Ils ne sont pas nombreux à vivre de ce qu’ils écrivent. D’après ce que j’entends dire.

- C’est vrai. C’est le sort des écrivains, dans ce pays. Il s’en plaignait amèrement.

- Il se plaignait… Il ne se plaint plus ?

- C’est exactement de ça que suis venue vous parler.

- Je suis toute ouïe.

Júlio Conrado, Desaparecido no Salon du Livre, Bertrand, 2001

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Berimbau

Posté : 1 avril, 2010 @ 7:10 dans musique et chansons | Pas de commentaires »

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Canto de Ossanha

 

Vinicius de Moraes – Tom Jobim – Toquinho – Miucha (1976, Italie)

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