Lusopholie

Lettres, poésie et musique lusophones

Archive pour mai, 2010

leçon de choses

Posté : 12 mai, 2010 @ 7:26 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

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- De tous les feux, la foudre est celui qui supporte le moins la trop grande confiance. Rayant le ciel à une vitesse que les yeux ne peuvent pas suivre, elle fulmine implacablement tout ce qui la défie debout, un arbre, une personne, ou n’importe quoi d’autre. On l’appelle aussi le rayon, ou l’éclair, expliquait le vieil instituteur, sous un arbre géant à longue barbe pendante, un mulemba.
-
« Fulmine », qu’est-ce que ça veut dire ? demanda l’un des élèves, inquiet, car de gros nuages noirs s’amoncelaient dans le ciel, promettant des orages.
- « Fulmine » veut dire « carbonise »; ça veut dire qu’elle lance un feu très rapide qui réduit tout en cendre.
Les élèves s’agitèrent, mal à l’aise, sur les pierres qui leurs servaient de banc. Pour eux, ils pouvaient rentrer à la maison, la leçon du jour était apprise, mais l’instituteur ne semblait pas pressé. Il avait l’air d’attendre la pluie et les éclairs pour faire la preuve par neuf.
Il se fit un silence soudain, le vent agita la nature entière, et ce ne fut pas la pluie, finalement, qui vint la première. Du maquis proche sortit un groupe d’hommes, le canon du fusil en l’air.
- On peut s’abriter un instant sous votre arbre ? demanda celui qui paraissait être le chef.
L’instituteur fit oui de la tête, contraint et forcé, et fit faire de la place pour les inconnus. Alors la pluie arriva, un grand fleuve qui tombait du ciel tout d’un coup, puis le bruit du tonnerre. L’orage cessa soudainement alors que les premières gouttes commençaient à peine à traverser le feuillage du mulemba. Aucun éclair ne l’avait atteint, bien qu’il fût le plus haut de tous les arbres.
- Vous avez vu ? C’est parce que le mulemba n’a jamais voulu les défier, tenta d’expliquer le maître aux élèves, encore effrayés mais confiants dans sa science.
Les hommes armés se préparaient à partir.
- Nous ne pouvons pas laisser de témoins de notre passage, dit le chef en pointant vers eux les canons des fusils.
Les armes contredirent le vieil instituteur : la foudre fulmine même si on ne la défie pas.

José Mena Abrantes (Angola), Caminhos des-encantados, Caminho, 2000

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Mulemba

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un fantôme

Posté : 10 mai, 2010 @ 7:10 dans - époque contemporaine, littérature et culture | 2 commentaires »

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(Photographie de l’auteur)

Mais bien sûr, je connais bien cette silhouette. Ce ne peut-être que lui – le fantôme du ministre de la ville. Je me suis penché en avant sans faire un pas, pour ne pas dépasser la limite minimum de distance à laquelle les fantômes disparaissent sans crier gare. Non, ce n’était pas lui.
Ça ne serait pas le fantôme du pape ? Comme ça, légèrement penché sur le côté. On voit nettement les contours de la mitre. Non. C’est à cause de la perspective. Sûr. Le pape n’est pas encore mort. Evidemment. On dirait plutôt un terroriste encagoulé. C’est ça. Mais quel travail bâclé! Immobilisé avec du papier collant – la tête et tout le torse – et attaché à un support de fer. Capturé et abandonné ? Mais tout ça est absurde. Une irresponsabilité, un crime. Ils sont tous pareils !
Il est possible que les fantômes existent, les âmes et autres choses inexplicables. Mais leurs ombres sont éternelles, sous toutes les perspectives. Pourquoi passer son temps à leur courir après ?
La résignation face à la portée limitée des sens m’a permis de voir clairement l’épouvantail dans toute sa splendeur, modestement vêtu, simplement pour agiter les esprits des passants. Je me suis approché sans appréhension ni répugnance, – c’était le distributeur de tickets du futur parking. Finalement, il n’y avait pas de quoi fouetter un chat, ce n’étaient pas les Mystères de Paris ! …
Heureux le jour où je n’ai rien cherché et où je n’ai rien trouvé.

Dimíter Ánguelov, Longe da espécie, inédit.

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L’île de Príncipe

Posté : 7 mai, 2010 @ 7:01 dans - époque contemporaine, littérature et culture, Poesie | 2 commentaires »

 

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L’île te parle
de roses sauvages
aux pétales
d’abandon et de peur.

Au fond de l’ombre
buvant dans des coquilles
d’écume rouge
quel monde de gens
entre des rideaux
épais de douleur.

Oh, le soir clair
de cette fin d’hiver !
Seule aux heures bleues
au fond de la cabane,
et à présent l’île,

la ligne sauvage des roses
et la grande bave noire
et mortelle des serpents.

Maria Manuela Margarido (Ile de Príncipe 1925-Lisbonne 2007)

(Alto como o silêncio, 1957)

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Nightmare

Posté : 6 mai, 2010 @ 7:01 dans - époque contemporaine, littérature et culture | 2 commentaires »

 

 

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La Cavale Indomptable, Debat-Ponson, fin du dix-neuvième.

 

- C’était, à peu près, à l’époque où le Vatican a annoncé qu’à partir de 2012 la langue officielle de l’Enfer serait l’anglais. Il faisait nuit et je montais une jument.
- Ne me décrivez pas de couleurs, de voix, de silences, de chemins. Allez droit à l’histoire.
- En chemin j’ai rencontré la carcasse blanche d’une histoire et à mesure que j’avançais la jument rétrécissait, rétrécissait, jusqu’à ce que je m’aperçoive que je marchais sur mes propres pieds. Non, je regardais le lever de la lune. Non, non. C’était une lampe qui a fait disparaître la jument nocturne.
Ce jour-là j’avais tué une jeune vipère, après une douloureuse hésitation. Ce serpent pourrait tuer un rêveur adulte, peut-être un célèbre scientifique ou philosophe chrétien ou même un enfant innocent, capable d’admirer l’animal le plus répugnant que la belle et fière Nature a créé. Heureusement, le côté humain l’a emporté en moi. Ne serait-ce pas le fantôme de l’animal, anciennement sacré ?
Des fantômes, j’en avais vu partout, même lors de mes observations à la loupe quand la minéralogie était mon passe-temps.
Mais bien sûr, je connais bien cette silhouette. Ce ne peut-être que lui – le fantôme du ministre de la Ville. Je me suis penché en avant sans faire un pas, pour ne pas dépasser la limite minimum de distance à laquelle les fantômes disparaissent sans crier gare. Non, ce n’était pas lui…

[...]

Dimíter Ánguelov , Longe da espécie, inédit

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« tension »

Posté : 3 mai, 2010 @ 8:10 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture, Poesie | Pas de commentaires »

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- Picandon, écoute, moi je suis très surpris,
par Messire Sordel
(1), je connais ses chansons,
elles sont nombreuses et belles, et la musique aussi;
comment peut-il se tromper à ton sujet, ainsi,
sur toi, qui n’es rien d’autre qu’un jongleur;
pourquoi est-il à la cour ton protecteur :
toi, ou bien lui, expliquez-moi cela.

- João Soares, voilà d’abord l’explication,
et au plus vite, la voici la raison :
je peux remporter tous ces prix
et être apprécié à la cour
comme un jongleur talentueux qui peut dire :
« Voyez, je ne me trompe jamais
dans mes chants, mes sirventês, mes strophes. »

- Picandon, on ne peut dire qu’il soit courtois
que tu te vantes toi-même beaucoup,
que tu fréquentes les tavernes,
que tu boives, que tu cherches querelle,
ou alors, si c’est la raison de ton succès,
jamais Notre Seigneur n’a fait homme aussi courtois
que toi, si tu y réfléchis.

- João Soares, même si vous m’insultez,
je vais rester le bon jongleur que je suis,
quant à vous, Messire, vous feriez mieux
d’apprécier tous les jongleurs ;
je sais beaucoup de chansons, je chante bien,
je ne me trompe jamais, et je chanterai toujours
quand vous m’en ferez la demande.

- Messire Picandon, je me rends,
je te demande pardon pour mes paroles
et, de ce pardon, je te remercie.

- João Soares, je vous pardonne volontiers
si vous pensez à mon cadeau, et ne m’oubliez pas,
pour les profits, en quelque lieu où vous alliez.

 

João Soares Coelho et Picandon, XIIIème siècle (CV 1021)

(1) Le plus grand troubadour italien en langue provençale, Autour de lui est né un mythe que l’on retrouvera jusque dans la poésie occidentale du XIXe et du XXe siècle.

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Sordel

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gâteau de mai

Posté : 1 mai, 2010 @ 3:47 dans - époque contemporaine | 4 commentaires »

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Un traditionnel, dont voici la recette :

  • 500 g de sucre
  • 500 g de farine de maïs
  • 6 œufs
  • 2cuillères à soupe de cannelle moulue
  • 2 cuillères à soupe d’anis moulu
  • 2 cuillères à soupe de miel
  • 6 cuillères à soupe d’huile d’olive
  • 1 litre de café
  • 1 cuillère à soupe de beurre
  • Sel

Préparation

  • Mouiller la farine avec le café bien chaud
  • Ajouter le sel et le beurre
  • Laisser refroidir le mélange
  • Ajouter les œufs, la cannelle, l’anis, le miel et l’huile d’olive en mélangeant bien
  • Verser la préparation dans un grand moule enduit de margarine
  • Mettez à four moyen une heure et demie environ

Primeiro1Maio1B dans - époque contemporaine

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