Lusopholie

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Archive pour le 24 décembre, 2010

Soir de Noël

Posté : 24 décembre, 2010 @ 8:10 dans - époque contemporaine, littérature et culture | 6 commentaires »

 


Soir de Noël dans - époque contemporaine dimite10

Photographie Dimíter Ánguelov

Il était près de minuit et l’homme était encore assis au comptoir, à boire du brandy. Les tables étaient inoccupées et de moins en moins de gens entraient. Seuls s’attardaient ceux qui venaient acheter des gâteaux, du vin et des boites de chocolats qui faisaient plaisir à voir dans leurs jolis emballages. C’était jour de fête.
Donc, le peu de temps où les clients restaient là, l’homme qui buvait du brandy au comptoir, à les voir et à les entendre, sentait une chaleur humaine et, un instant, il avait l’impression qu’il allait les accompagner à la fête.
A présent les entrées d’acheteurs de joie s’espaçaient. Il n’y avait plus de gâteaux des rois. Jusqu’à ce qu’entre une femme, encore jeune, qui acheta deux sandwichs, l’air distrait, ne remarquant rien de ce qui se passait autour d’elle.

L’homme qui buvait du brandy au comptoir pressentit que cette femme pouvait être une compagnie car, comme lui, elle n’avait pas de fête prévue ce soir-là. Il pensa même à lui offrir une des boites colorées pleines de chocolats qui décoraient la vitrine. Mais combien coûte une boite de chocolats, combien coûte, sans joie, en gâteaux et en vins, une fête ?
Il la vit sortir, l’air aussi désemparé qu’en entrant. Finalement, une fête, pensa l’homme, ce n’est qu’une marque de l’un des jours du calendrier, qui n’est pas valable pour tout le monde.
Maintenant, le café était vide. Les garçons baillaient, désireux de s’en aller, et regardaient l’homme qui buvait du brandy au comptoir d’un air réprobateur, comme si c’était de sa faute s’ils étaient encore là.
L’homme sentit que la solitude qui l’encerclait était totale.
La ville lui parut subitement déserte. Seul au monde, pensa-t-il. Le froid le transperça. Ne sachant pas où aller, il mit les mains dans ses poches, se courba un peu contre le vent. Et disparut dans le noir, là, au bout de la rue.

Manuel da Fonseca, Conte de Noël source : Projecto vercial

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