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Archive pour la catégorie '- moyen âge/ XVIème siècle'

Sirventès (rien ne change)

Posté : 6 février, 2010 @ 7:30 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture, Poesie | Pas de commentaires »

Sirventès (rien ne change) dans - moyen âge/ XVIème siècle pero_m10

 

Je vois les gens changer d’avis
et d’affection rapidement
dans les affrontements de castes
c’est cela qu’à présent j’apprends
et bientôt encore j’apprendrai :
à qui j’ai promis, je mentirai,
et ce faisant je prospèrerai.

Car je vois que le menteur se porte mieux
que celui qui dit la vérité à son ami ;
et c’est pourquoi je jure et j’affirme,
que je ne serai plus jamais sincère,
mais que je mentirai et soutiendrai tout :
à qui je veux du bien, je voudrai du mal,
et j’en deviendrai meilleur chevalier.

Ni mon prestige ni mon honneur ne croissent,
parce que j’ai voulu dire la vérité,
je sais ce que je ferai, par charité,
en voyant ce qui est en train de m’arriver,
je mentirai à mon ami et à mon seigneur,
et mon prestige augmentera, et ma valeur
si je mens, car quand je suis sincère ils diminuent.

Pero Mafaldo CA 435/CBN 316 ( Aragon), biographie inconnue

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à la fontaine

Posté : 28 décembre, 2009 @ 7:05 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture, Poesie | 11 commentaires »

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Jeune fille à la fontaine (Heures de Pierre Laval, XVème siècle)

Je suis allée, mère, laver mes cheveux
à la fontaine, et je les aime, eux,
et moi aussi, la belle.

Je suis allée, mère, laver mes boucles
à la fontaine, et je les aime, elles,
et moi aussi, la belle.

A la fontaine, amoureuse de mes cheveux
pour eux, mère, j’ai trouvé l’amoureux
et pour moi aussi, la belle.

Car, avant de m’en aller d’ici,
je suis amoureuse de ce qu’il me dit,
et de moi aussi, la belle.

João Soares Coelho, Cour d’Afonso III, puis de D. Dinis, 1248-1280

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la maison d’Hercule

Posté : 22 décembre, 2009 @ 8:31 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture | Pas de commentaires »

 

cadenas.jpg

Et le roi leur demanda quelle était cette maison dont ils lui parlaient ou pourquoi il devrait y apposer son cadenas. Et ils lui dirent :
- Seigneur, nous te le dirons de très bon gré, car nous savons toute la vérité. Sache que, quand le grand Hercule passa par l’Espagne et y réalisa les exploits que tout le monde connaît, il fit bâtir à Tolède une maison si ingénieuse et si subtile que nous ne pourrions te dire comment elle fut faite ni par quel sortilège. Cette maison est toute ronde et, en la voyant, seigneur, elle te semblera rien d’autre qu’une cuve élevée sur son couvercle. Et nous pouvons te dire en vérité que maints hommes ont tenté de jeter une petite pierre au-dessus de cette maison ; et jamais nous n’en avons vu aucun qui pût la faire passer de l’autre côté. Nous pouvons t’assurer que tu ne trouveras au monde aucun homme qui par sa connaissance puisse te dire comment elle est faite à l’intérieur. Mais, ce que nous voyons de son extérieur, cela nous pouvons te le dire.
Sachez que dans toute la maison il ne se trouve pas une pierre qui ne semble plus grande que la main d’un homme ; et nous voyons bien que presque toutes sont en marbre. Elles sont si claires que c’est merveille, et de tant de belles couleurs variées qu’on peut difficilement penser qu’elles ne sont faites que de deux ou trois blocs unis.

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la mort du rossignol

Posté : 26 novembre, 2009 @ 8:01 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture | Pas de commentaires »

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Statue imaginaire de Bernadim Ribeiro

La chaleur commençait alors à vouloir tomber et, en chemin, dans la hâte que j’avais de la fuir, ou à cause du mauvais sort qui me poussait, trois ou quatre fois je tombai. Mais, comme après mes malheurs je croyais n’avoir plus rien à redouter, je ne prêtai pas attention à ce qui, semble-t-il, était un signe de Dieu pour me prévenir du changement qui devait par la suite se produire. Arrivant sur la berge, je cherchai du regard les lieux les plus ombragés, et il me sembla qu’ils se trouvaient au-delà de la rivière. Je me dis alors à moi-même qu’en cela on pouvait voir que l’on désirait le plus tout ce qu’il était le plus difficile d’obtenir ; car on ne pouvait y accéder sans passer l’eau, qui coulait là plus docile et plus haute qu’ailleurs. Mais moi, qui me réjouis toujours de chercher mon malheur, je passai de l’autre côté, et j’allai m’asseoir sous l’ombre épaisse d’un vert frêne, qui était un peu en contrebas et dont certaines des branches s’étendaient au-dessus de l’eau, qui avait à cet endroit un léger courant, et qui, gênée par un rocher qui se trouvait au milieu d’elle, se divisait d’un côté et de l’autre en murmurant. Moi, qui avais les yeux posés là, je commençai à examiner comment les choses qui n’avaient pas d’entendement pouvaient aussi se contrarier entre elles, et j’apprenais en cela à me consoler un peu de mon malheur : ainsi ce rocher était en train de contrarier cette eau qui voulait aller son chemin, comme mon infortune, en d’autres temps, avait coutume de le faire pour tout ce que je désirais le plus ; car à présent je ne désire plus rien. Et de là me vint de la tristesse, car après le rocher l’eau se rejoignait et continuait sa course sans aucun bruit ; il semblait plutôt qu’elle courait là plus vite que de l’autre côté, et je me disais que cela devait être pour s’éloigner plus vite de ce rocher, ennemi de son cours naturel, qui, comme par force, se trouvait là. Il ne tarda pas que, pendant que j’étais ainsi à méditer, sur une verte branche qui s’étendait au-dessus de l’eau, vînt se poser un rossignol, et qu’il commençât un chant si suave que mon sens de l’ouïe m’emporta tout entière après lui. Et lui, à chaque fois, augmentait ses lamentations, à chaque fois il semblait que, fatigué, il voulait s’arrêter, mais aussitôt il reprenait, comme s’il venait à peine de commencer. Le pauvre petit oiseau, pendant qu’il se lamentait ainsi, je ne sais comment, tomba mort sur l’eau ; et, lorsqu’il tomba entre les branches, beaucoup de feuilles tombèrent en même temps que lui.

 

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Revendication

Posté : 18 novembre, 2009 @ 8:12 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture, Poesie | 4 commentaires »

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Gil Vicente, 1465- 1536

Juliana:

Je ne sais pour quelle raison
et nos mères et nos pères
nous proposent pareils maris
si peu de notre goût
que le diable ne le serait.
Leurs têtes paraissent monts,
leurs cheveux par les vers mangés
le teint tel écorce de chêne,
peignés une fois l’an
et en livrée de pire espèce :
réjouissez-vous avec de tels maris !

Ilaria:

Et le mien pour ses péchés
louche comme jamais n’ai vu,
les deux yeux en meurtrières ;
si tu lui parles ou chose ainsi
tu ne sauras s’il te regarde
ou s’il regarde en haut des toits.

João:

Vous êtes, ma foi, d’une engeance
de fort curieux appétit !
Voyez un peu comme il en est,
à ramer comme en galère
et à vouloir bon vent en poupe !

Mariez-vous, crénom, de bon sens
et jetez au diable le sentiment,
car tout cela n’a qu’un temps
et quiconque se marie en raison
trouve sagesse en son foyer.

Gil Vicente, Romagem d’Agravados, première représentation 1533, (traduit par Bernard Emery)

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Afonso Henriques : indépendance

Posté : 14 novembre, 2009 @ 7:38 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture | Pas de commentaires »

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Le cardinal vint de Rome par l’Espagne, et les Rois chez qui il passait l’honorèrent beaucoup. Et l’on dit au Roi dom Afonso:
- Sire, voici un cardinal qui vient à vous de Rome parce que vous êtes en mauvais termes avec le Pape à cause de cet évêque que vous avez fait.
Et le Roi dit:
- Je ne m’en suis pas encore repenti.
Et on lui dit:
- Sachez, Sire, que tous les Rois chez qui il passe ne manquent pas de lui baiser la main.
Et le Roi répondit:
- Nul cardinal si honorable à Rome ne viendra à Coimbra me tendre sa main à baiser sans que je la lui coupe, et il n’en mourra pas.
Et quand le cardinal arriva à Coimbra, il apprit ce que le Roi avait dit et eut très grand peur.
Le Roi refusa d’aller au devant de lui. Et lui, sitôt qu’il arriva en ville, se rendit au palais où était le Roi qui le reçut fort bien et lui dit :
- Cardinal, que venez-vous de Rome faire ici, car de Rome il ne m’est jamais rien venu, sinon du mal? Et quelles richesses m’apportez-vous de Rome pour ces attaques que je fais sans cesse contre les Maures? Monsieur le cardinal, si vous m’apportez quelque chose, donnez-le-moi, sinon passez votre chemin.
Et le cardinal dit:

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Conseil judicieux

Posté : 22 octobre, 2009 @ 7:50 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture | Pas de commentaires »

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que non faledes ao voss’ amigo
sen mi, ai filha fremosa
E se vós, filha, meu amor queredes,
rogo vos eu que nunca lhi faledes
sen mi, ai filha fremosa
E al á i de que vos non guardades:
perdedes i de quanto lhi falades
sen mi, ai filha fremosa
Ma fille jolie, écoutez ce que je vous dis:
Ne parlez pas à votre ami
En mon absence, ma fille jolie.
Et, ma fille, si vous voulez mon amour,
Je vous prie de ne jamais lui parler
En mon absence, ma fille jolie.
Et vous devriez vous méfiez :
Chaque mot que vous lui dites est perdu
En mon absence, ma fille jolie.

 

 Bernardo de Bonaval, Galice, XIIIe siècle

 

Chanson méchante

Posté : 13 octobre, 2009 @ 7:02 dans - moyen âge/ XVIème siècle, littérature et culture, Poesie | Pas de commentaires »

troubadour3.jpg

*

Jongleur Lopo, tu es un ivrogne,
et tu es triste quand tu manges;
deux défauts qu’un homme,
en justice, doit pouvoir supporter;
mais gratter la cithare te démange
et, de plus, tu te mets à chanter,
deux plus deux, ça fait quatre.
Si comme la verte coccinelle,
tu veux, de plus, tirer profit
de tes défauts, c’est trop
pour qu’on le supporte:
un jour où tu chanteras, ici ou là,
ta cythare, quelqu’un te la cassera
sur la tête.

Martim Soares (XIIIème siècle)

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