Lusopholie

Lettres, poésie et musique lusophones

Archive pour avril, 2008

Fado portugais

Posté : 20 avril, 2008 @ 7:10 dans musique et chansons, Poesie | 10 commentaires »

 

coteportugaise.jpg

Côte portugaise (Tissu appliqué d’Evelyne Régnault)

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Dulce Pontes

Le Fado est né un jour,
où le vent soufflait à peine
et où le ciel prolongeait la mer,
à la rambarde d’un voilier,
dans la poitrine d’un marin
qui, étant triste, chantait,
qui, étant triste, chantait.

Hélas, quelle grande beauté,
ma terre, ma colline, ma vallée,
de feuilles, de fleurs, de fruits d’or,
vois-tu les terres d’Espagne,
les sables du Portugal,
regard aveuglé par les pleurs.

Dans la bouche d’un marin
de la fragile barque à voile,
mourante, la chanson douloureuse,
dit comme est poignant le désir
de la lèvre brûlante de baisers
qui embrasse l’air, et rien d’autre,
qui embrasse l’air, et rien d’autre.

Mère, adieu. Adieu, Maria.
Garde bien à la mémoire
qu’ici je te fais promesse :
je t’emmène à la sacristie,
ou bien c’est Dieu qui sera servi
en me donnant la mer pour sépulture.

Or voici qu’un autre jour,
où le vent ne soufflait même pas
et où le ciel prolongeait la mer,
à la proue d’un autre voilier
veillait un autre marin
qui, étant triste, chantait,
qui, étant triste, chantait.

Poème de José Régio (1901-1969), musique d’Alain Oulman, chanson d’Amália Rodrigues (premier enregistrement 1965).

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Voix d’au-delà

Posté : 5 avril, 2008 @ 12:05 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

 

 

Il zigzaguait entre deux voitures mal garées comme s’il ne parvenait pas à sortir de là et il parlait à son téléphone portable avec des gestes de désespoir. Puis il le jeta à terre.
- Plus de batterie ? demandai-je en signe de solidarité.
- Non.
- La communication a été coupée ?
- Elle s’est arrêtée en enfer.
- Et maintenant ?
- Maintenant je n’arrive plus à en sortir.
- Décrochez.
- Peux pas, continua-t-il dans son style bref, et il se mit à piétiner le portable avec une rage inusitée quand il s’agit de maltraiter des objets inanimés.
- Ecoutez, piétiner un objet comme ça, sans pitié, c’est un péché.
Il s’arrêta un instant et dit :
- De toute façon, je ne m’en sortirai pas.
- Calmez-vous, vous avez encore une longue route jusqu’à l’enfer.
A peine s’était-il adossé à l’une des voitures que son portable sonna. Par ses gestes, par ses hochements de tête, je pense avoir reconstitué fidèlement la conversation suivante :
- John, il faut que tu traverses ce désert tout seul, et le mieux possible, si tu veux survivre. Mais n’en cherche pas les raisons. Ne dis pas « Cela en vaut-il la peine ? ». Parce que ce ne sera plus toi qui parles. Je ne peux plus t’aider.
- Mais je ne m’appelle pas John. Et je ne vois aucun désert.
- C’est cela même. Ce désert se ressent. S’il était visible, tu verrais aussi celui qui te parle.
- Je ne comprends rien aux mystères.
- C’est cela même. C’est parce que tu ne comprends rien aux mystères que tu dois traverser ce désert.
Un bref intervalle suivit.
- C’est une vallée de chiffres – on entendait toujours la voix, maintenant lointaine. – Ne cherche pas à les interpréter. Ce sont des chiffres inutilisés.
Il regarda longuement dans différentes directions, puis il retira avec précaution les touches des chiffres du portable, le mit dans sa poche, et, d’un air décidé, poursuivit son chemin.

Dimíter Ánguelov, Partida incessante, Nova Ática , 2001

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Un peu de civilisation…

Posté : 2 avril, 2008 @ 6:45 dans - époque contemporaine, vidéos documentaires | 13 commentaires »

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La prof vient de confisquer un téléphone portable à une élève.

La traduction semble inutile pour comprendre la situation, et rien n’empêche de faire des parallèles. La scène a été filmée par… un portable.

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Pré-géographie

Posté : 1 avril, 2008 @ 8:02 dans - époque contemporaine, littérature et culture | Pas de commentaires »

gographie.jpg

Le drapeau d’un pays est un hélicoptère : il faut de l’essence pour maintenir le drapeau en l’air ; le drapeau n’est pas en tissu mais en métal : il claque moins au vent, face à la nature.
Nous avançons sur la géographie, nous en sommes encore au lieu d’avant la géographie, à la pré-géographie. Après l’Histoire il n’y a pas de géographie.
Le pays est inachevé comme une sculpture : voyez la géographie d’un pays : il lui manque du terrain, à cette sculpture inachevée : elle envahit le pays voisin pour achever sa sculpture. Un guerrier-sculpteur.
Le massacre vu d’en haut : une sculpture. Tous les restes de corps peuvent être le début d’autres matières.
Il arracha avec force du sol un chien. Ce n’était pas un petit arbre, c’était un chien.

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